Histoire culturelle des techniques du Moyen-âge à nos jours
L’ordre matériel des savoirs techniques (XVIe -XIXe siècles) : l’ingénieur et ses sources privées
Conférences de l’année 2018-2019
Les vendredis de 11h à 13h en salle EPHE à l’INHA (derrière l’auditorium).
Emilie d’Orgeix emilie.dorgeix@ephe.psl.eu | +(33) 6 71 47 04 81
Les conférences de l’année 2018-2019 sont centrées sur l’étude de la documentation, privée ou personnelle, réalisée par les ingénieurs du roi du XVIIe au début du XIXe siècle. Elles se fondent sur l’étude de sources conservées dans des fonds publics, militaires et privés qui permettent d’approfondir les savoirs et pratiques de cabinet de l’un des plus grands corps bâtisseurs d’Ancien Régime, responsable notamment de la construction, de l’attaque et de la siècle. Elles se fondent sur l’étude de sources conservées dans des fonds publics, militaires et privés qui permettent d’approfondir les savoirs et pratiques de cabinet de l’un des plus grands corps bâtisseurs d’Ancien Régime, responsable notamment de la construction, de l’attaque et de la défense de l’ensemble des villes et des ouvrages fortifiés du pays.
Les sources étudiées, « oisivetés », mémoires, recueils, portefeuilles, papiers et « ramas » – témoignent de l’organisation personnelle des connaissances et des savoirs de la part de professionnels dont les pratiques de travail sont encore très peu connues et qui, par opposition aux architectes ou à la plupart des corps d’artisans, n’ont longtemps bénéficié
d’aucun soutien académique, corporatif ou pédagogique (la fondation de l’École royale du génie de Mézières datant de 1743).
Le séminaire porte ainsi sur l’exploitation de documents qui se situent à la frontière des espaces privé et public de l’ingénieur. Les listes et inventaires de collections (parfois encore conservées dans des fonds privés mais plus souvent saisies par l’administration militaire au lendemain de leur décès : Cormontaigne, Frézier, Haxo, Leblond, Masse, Naudin, Rogniat, Vauban …) constituent des sources exceptionnelles pour saisir les personae des ingénieurs. Ils permettent de restituer l’agencement de leurs espaces de travail, leurs pratiques de collationnement (billets, liasses, ballots, rouleaux, cartons, recueils, portefeuilles, coffrets…), leurs méthodes de classement et de hiérarchisation des documents ainsi que les associations créées entre leurs différents « outils » de travail (documents textuels et iconographiques, matériel de dessin, instruments de mathématiques, maquettes, plans-reliefs…). Ces sources éclairent également, en corolaire, l’ensemble de leurs
préoccupations professionnelles et techniques (cartographie, fortifications, urbanisme, architecture, chantiers, procédés, engins…).
D’un point de vue matériel, la composition de ces archives d’ingénieurs mêlant documentation personnelle, littérature grise et production administrative, est précisément renseignée par des listes, des états, des inventaires exhaustifs et des correspondances. On trouve notamment, au Service Historique de la Défense, des correspondances de famille
(qui tentent de garder leurs « papiers » d’ingénieurs familiaux) et d’agents militaires mandés pour en faire l’inventaire détaillé avant de les restituer aux archives militaires (ou de brûler sur place les doublons dont la circulation pourrait être dangereuse pour la sécurité de l’État). Ainsi, en parallèle de l’immense production militaire imprimée (traités, manuels, cours…) qui divulgue un savoir composé et souvent artificiellement théorisé (et qui forme une « culture moyenne » chez l’ingénieur, notion qui sera évoquée en trame de fond au fil des conférences), l’étude de ces séries documentaires, renouvelle profondément les connaissances sur les conditions d’exercice du métier d’ingénieur dans toute sa matérialité et au plus près du terrain dans les villes (où les réseaux de villes) dont il assurait la défense et où il conduisait ses nombreux chantiers d’architecture et d’urbanisme (Lille pour Vollant, Metz pour Cormontaigne, les Alpes et la Lombardie pour Haxo…)…
Les apports de ces documents inédits sont nombreux. L’étude des papiers de Simon Vollant (devis, estimations, calculi, toisés, métrés…) documente, par exemple, les relations complexes entre ingénieurs et corps bâtisseurs. Ceux de Louis de Cormontaigne (dessins techniques et modèles d’outils et d’instruments) soulignent l’intérêt des ingénieurs pour la modernisation des techniques ouvrières et des gestes et mis en œuvre sur les grands chantiers. Les manuscrits de Claude Masse enfin témoignent au début du XVIIIe siècle, de leur volonté de formaliser leurs savoirs au moment ou la ville forte devient un outil physique et intellectuel pour (re)penser l’espace. L’attention sera portée, tout au long de l’année, à (1) dégager des typologies de sources et de types de documents de travail (2) saisir les « effets de sens » que révèle l’organisation de la documentation privée des ingénieurs , et, (3) envisager comment leur apport peut nourrir la réflexion sur les modes de structuration du travail et sur l’intelligence technique chez les ingénieurs.
Plan prévisionnel des séances
(Ce calendrier pourra être modifié en fonction des discussions et de l’étude des sources).
Module 1/ La culture de l’ingénieur à l’époque moderne
26 octobre 2018
L’ingénieur militaire (XVIe -XVIIIe siècle) et ses sources. Introduction aux séances
2 novembre 2018
L’acquisition et la transmission des modèles théoriques : culture imprimée et transmission manuscrite. Les relations entre savoirs savants et savoirs pratiques et leurs supports I.
8 novembre 2018
L’acquisition et la transmission des modèles théoriques : culture imprimée et transmission manuscrite. Les relations entre savoirs savants et savoirs pratiques et leurs supports II.
16 novembre – pas de séance
Séminaire ‘Construire, Détruire, Restaurer », INHA, salle Vasari, 9h-13h30.
« Villes en chantier : détruire, restaurer et construire à l’échelle urbaine (1760-1840) »
23 novembre 2018
Papiers et manuscrits d’ingénieurs : entre écrits du for privé et littérature grise : essai de typologie
30 novembre 2018
Journaux et récits de voyages : les manuscrits d’espionnage de la fin du XVIIe siècle.
7 décembre 2018
Visite de l’exposition L’art du chantier à la Cité de l’architecture et du patrimoine (Commissariat Valérie Nègre)
14 décembre 2018
Le manuscrit de Domenico I Pelli, ingénieur tessinois au milieu du XVIIe siècle. Entre savoirs de terrain et lectures savantes
21 décembre
Le traité manuscrit de l’attaque et de la défense des places de Vauban (1704)
Module 2/Manuscrits d’ingénieurs
11 janvier 2019
Bibliothèques et collections d’ingénieurs militaires : la pratique des saisies administratives militaires
18 janvier 2019
Inventaires après-décès d’ingénieurs : état des sources et perspectives de recherche
25 janvier 2019
Les « oisivetés » de Vauban : une source pour l’histoire matérielle des ingénieurs ?
8 février 2019
Invitation et discussion autour du travail de Catherine Isaac (Toulouse II-Jean-Jaurès) sur « Les ingénieurs des Etats du Languedoc » et leurs sources privées
15 février et 22 février pas de séance
15 mars 2019
Les manuscrits de Claude Masse. Séance au Service historique de la Défense de Vincennes
22 mars 2019
Les traités de fortification de Claude Masse : une ambition pédagogique privée. I
29 mars 2019
Les traités de fortification de Claude Masse : une ambition pédagogique privée. II
5 avril 2019
Invitation et discussion autour du travail de Gilles-Antoine Langlois (ENSA Paris-Val-de- Seine) sur les ingénieurs des colonies en Louisiane.
III. Module 3/Papiers et « ramas » d’ingénieurs
12 avril 2019
Simon Vollant et Sébastien Le Prestre de Vauban : les relations entre deux ingénieurs envisagées grâce à l’étude de leurs « papiers privés »
19 avril 2019
La citadelle de Lille : une mise en technique impossible ?
10 mai 2019
Papiers d’ingénieurs : les manuscrits de Louis de Cormontaigne au dans la première moitié du XVIIIe siècle
17 mai 2019
La question du parc à outils dans les manuscrits de Cormontaigne
24 mai 2019
Invitation et discussion autour du travail de Guy Lambert (ENSA, Paris-Bellevile) sur les carnets d’ingénieurs
31 mai 2019
Marginalia. La pratique des annotations par les ingénieurs
7 juin 2019
Conclusion des séances