Séminaire Histoire de la construction
Organisé par
Le Centre de théorie et analyse du droit (CTAD) UMR 7074, CNRS – Université Paris Nanterre
Le Laboratoire Archéologie et Philologie d’Orient et d’Occident (UMR 8546, ENS-CNRS-EPHE)
et
Le laboratoire Orient & Méditerranée. Textes Archéologie Histoire (UMR 8167, CNRS-Sorbonne Université-
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne)
avec le soutien de l’EUR Translitteræ.
Mardi 13 décembre 2022
de 10h à 17h
La figure de l’ingénieur
Lieu :
Attention Changement de lieu
École normale supérieure, 45, rue d’Ulm 75005
Salle F (escalier D, 1er étage)
10h Introduction
10h15 Pauline Ducret, Université de la Réunion L’ingénieur romain, une figure aux mille visages (IIe s. av. J.-C. – IIe s. ap. J.–C.).
11h15 Catherine Isaac, École pratique des hautes études, La figure des ingénieurs des États de Languedoc à la lumière des sources.
12h30-14h Déjeuner
14h Sophie Fradier, ENSA Versailles et Toulouse, Dynamiques du “métier” d’ingénieur autour des années 1600 : l’exemple de la fratrie Souffron.
15h Sarah Melsens, architectural engineer and urban designer, MIT-ADT University in Pune (India) and Henry van de Velde Research Group at the University of AntwerpThe political agency of Indian public-works engineers (1880-1980)
16h15 Revue de publications récentes sur l’histoire de la construction
Résumés
Pauline Ducret, actuellement PRAG d’histoire à l’Université de la Réunion, soutiendra en décembre 2022 une thèse de doctorat intitulée « La dynamique du chantier. Construire à Rome et dans le Latium (IVe s. av. J.-C. – Ier s. ap. J.-C.) » préparée sous la codirection de C. Saliou (Université Paris 8 – Vincennes – Saint-Denis) et S. Camporeale (Università di Siena). Elle y étudie les acteurs de la construction, des maîtres d’ouvrage aux ouvriers en passant par les architectes et les entrepreneurs, afin de mette en lumière l’organisation d’un secteur du bâtiment qui se structure peu à peu durant les derniers siècles de la République romaine.
L’ingénieur romain, une figure aux mille visages (IIe s. av. J.-C. – IIe s. ap. J.-C.)
Il n’existe pas, dans la Rome antique, de professionnels de la construction que l’on puisse identifier comme l’équivalent de la figure moderne de l’ingénieur ou, tout du moins, les sources antiques n’offrent-elles aucun parallèle clair à cette figure. Elles montrent plutôt l’éclatement de ses fonctions entre des personnages aux rôles et aux statuts fort différents.
Des architecti faiseurs de ponts, creuseurs de tunnels ou spécialisés dans les engins militaires aux machinatores et autres aménageurs de jardins, en passant par des entrepreneurs qui mettent en avant leurs compétences techniques, nous tenterons de dresser le portrait de ceux qui imaginent, innovent, adaptent, en un mot inventent l’architecture romaine.
Bibliographie sélective :
– « L’inscription de la via Caecilia (Italie, fin iie– début ier s. av. J.-C.) », Ædificare, Paris, 2021/1, p. 257-268.
– avec Carrive M., « Maintenance of the Parietal Coverings in Ancient Rome: Confrontation between Juridical Norms and Archaeological Evidence », Building Knowledge, Constructing Histories (6th International Congress on Construction History, Brussels), Boca Raton, Londres, 2018, p. 5-11.
– « Remplois d’éléments architecturaux volés et innovations architecturales : l’introduction du marbre dans la Rome tardo-républicaine », MEFRM, Rome, 2017/1, p. 165-176.
– « Une machine au service d’un chantier de restauration : le redressement des colonnes du temple des Castors à la fin de la République », in Fleury P., Madelaine S. & Sammour K. (dir.), Autour des machines de Vitruve. L’Ingénierie romaine : textes, archéologie et restitution. Actes du colloque organisé par l’ERLIS à Caen (3-4 juin 2015), PUC, Caen, 2017, p. 161-172. – « The Restoration of the Columns of the Templum Castoris during Verres’ Praetorship: Machina and Organisation of the Building Site », in Camporeale S., DeLaine J. & Pizzo A. (dir.), Arqueología de la construcción V. Man-made materials, engineering and infrastructure (Oxford, University of Oxford, Ioannou Center, 11-12/05/2015), Anejos del AEspA, Merida, 2016, p. 201-208.
Catherine Isaac est docteur en histoire de l’art et ingénieur. Sa thèse porte sur les ingénieurs des États de Languedoc au XVIIIe siècle, concernant notamment la formation, les réseaux et la vie quotidienne de ces ingénieurs et des entrepreneurs, et l’acquisition, la constitution et le partage des savoirs constructifs. Postdoctorante à l’École pratique des hautes études, elle travaille sur les machines et engins de chantiers à l’époque moderne.
La figure des ingénieurs des États de Languedoc à la lumière des sources
Au XVIIIe siècle, les États de la province de Languedoc mettent progressivement en place leur propre administration des travaux publics pour soutenir leur politique d’aménagement de leur territoire. À cette fin, ils recrutent leurs propres ingénieurs, indépendants aussi bien des ingénieurs des Ponts et Chaussées que des ingénieurs du roi. Ainsi émerge une figure d’ingénieur spécifique à cette province. La présente communication se propose de montrer comment les sources administratives, académiques ou techniques permettent de reconstituer et de caractériser cette figure d’ingénieur.
Bibliographie sélective
« De l’utilisation des mathématiques par les ingénieurs des États de Languedoc » in Thomas Morel et Thomas Preveraud (dir.) Les Mathématiques professionnelles (XVIe-XIXe siècles), Cahiers François Viète, série III, numéro 13, 2022.Les ingénieurs des États de Languedoc. Construire en province au XVIIIe siècle, Paris Classique Garnier, Coll. Histoire de la construction, à paraître.
Sophie Fradier a soutenu une thèse en Histoire de la construction en 2016, sous la direction de Pascal Julien et Javier Ibáñez Fernández, sous le titre Les frères Souffron (vers 1554-1649). Deux architectes ingénieurs entre Guyenne et Languedoc au temps de l’annexion de la Navarre. Elle est maître de conférences associée en Histoire et cultures architecturales à l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Versailles (2021-2022). Elle enseigne aussi à l’ENSA Toulouse, au sein du séminaire de recherche « Architecture-Patrimoines, Théories et Dispositifs », et co-dirige des travaux de recherche de masters au Département d’Histoire de l’Art et d’Archéologie de l’Université Toulouse-Jean Jaurès. Elle est membre associée du laboratoire FRAMESPA (UMR 5136, UT2J-CNRS), et participe à trois programmes de recherche sur l’histoire des techniques de restauration des terres cuites architecturales :
- RESTOR. Optimisation des techniques de restauration des briques foraines du patrimoine bâti Midi-Toulouse (Framespa UT2J-LMDC INSA ; lauréat de l’AAP « Bourses de thèse sur enjeux sociétaux – BTES » de l’INSA Toulouse, 2022-2025).
- ARS TEKNÈ. Savoir-faire artistiques de l’antiquité à nos jours. Approche diachronique, des sciences historiques aux sciences des matériaux (Framespa UT2J ; lauréat de l’AAP du Labex SMS, 2022-2024).
- THERESA (Terre, Histoire, Environnement, REStauration et Architecture). Approche diachronique des techniques de restauration des maçonneries en brique du patrimoine bâti régional d’Occitanie : la matérialité pour un dialogue entre science et histoire de la Renaissance à nos jours (soumission à l’AAPG ANR 2023).
- Dynamiques du “métier” d’ingénieur autour des années 1600 : l’exemple de la fratrie Souffron
- Notre connaissance de la figure de l’ingénieur à l’époque moderne s’est profondément renouvelée ces trente dernières années grâce à l’exploration, de plus en plus fine, de l’histoire de la construction des savoirs et des savoir-faire. Dans le prolongement de ces réflexions, l’enjeu de cette communication est de présenter des « hommes de l’ombre » ; le portrait d’une famille d’ingénieurs méconnue, et ce à travers l’étude de leur pratique de terrain et de leur production matérielle. Dans la famille Souffron, ils sont trois frères ingénieurs : Aymeric, Pierre I et Pierre II. Nous examinerons leur mobilité géographique et sociale, et interrogerons la dénomination même d’ingénieur qui est associée pour les désigner à d’autres qualificatifs. L’activité de Pierre II sera ensuite passée au crible. Avec lui, nous ouvrirons successivement trois dossiers : le chantier du Pont-Neuf à Toulouse, les démantèlements des places fortes protestantes du Midi ainsi qu’un corpus d’archives autographes composé de devis, marchés et procès-verbaux d’expertises. Trois dossiers à l’appui desquels il sera alors possible d’esquisser le profil d’un homme en mouvement, interconnecté à d’autres milieux socio-professionnels, doué d’une intelligence technique et collective, dont l’activité d’architecte-ingénieur expert témoigne – à l’aube du XVIIe siècle – tant de la porosité des frontières entre les différents acteurs du champ architectural que de l’hybridité des parcours.
- Bibliographie sélective :
- – Fradier Sophie, « L’innovation dans l’architecture des frères Souffron (vers 1554-1649). Une analyse du génie collectif », dans Jérôme Baudry, Jan Blanc, Liliane Hilaire-Pérez, Marc Ratcliff, Sylvain Wenger (dir.), Produire du nouveau ? Arts, techniques, sciences en Europe (1400-1900), Paris, CNRS, collection Alpha, 2022, p. 215-224.
- – Fradier Sophie, « Toulouse 1600, une ville en chantier », Pascal Julien (dir.), Toulouse Renaissance, [catalogue d’exposition, Musée des Augustins, 2018], Paris, Somogy, 2018, p. 274-279.
Sarah Melsens trained as an architectural engineer and urban designer at the Vrije Universiteit Brussel and at the Architectural Association in London. For the last ten years she has been dividing her time between her hometown in Belgium and the city of Pune, in India, where she conducts historical research on the built environment. Her work centres on the contributions of ‘forgotten’ city builders such as Indian engineers in the British colonial service and the rank-and-file architects engaged by Pune’s speculative developers. Her doctoral research entitled ‘Architect, Engineer, or Builder? A study of professional demarcation through practice and discourse, Pune (1930-1992)’ explored the multiple and meandering paths Indian architects forged in demarcating a professional identity that was both adapted to local circumstances and influenced by global networks and ideals.
Sarah is currently a visiting lecturer in at MIT-ADT University in Pune and a postdoctoral researcher at the Henry van de Velde Research Group at the University of Antwerp. She is also the assistant editor for the journal ABE: Architecture Beyond Europe, edited by INVISU and supported by the CNRS. For her research she makes extensive use of oral history and documentary material retrieved from unexplored private collections. This has proved a very effective method to reveal ‘history from below’ and ‘hidden histories’ of the built environment and draw attention to the social processes underpinning architectural production and reception.
The political agency of Indian public-works engineers (1880-1980)
Military and public works have played an important role in the establishment of engineering as a profession. In imperial contexts, such works provided colonial engineers with further opportunities to prove and establish themselves. For colonised subjects, however, it took a great deal of effort and chance to access the profession– leave alone acquire the status associated with it. This talk traces the personal histories of some of the most illustrious Indian engineers who nevertheless made career in British India’s colonial Public Works Department. It explores the social profile and educational background of these engineers, the challenges and opportunities they encountered while working for the colonial government, and how they ultimately used their standing to promote the interests of their own communities. A discussion of their largely overlooked built and written contributions will highlight how employment in public works engineering gradually offered Indians a route to accumulate political agency and prestige. It is this prestige that helped found the important relationship between civil engineers and the State in the early decades after Indian independence in 1947.
Selected Bibliography
– Melsens Sarah, Bertels Inge, and Srivastava Amit, “Intermingled interests: social housing, speculative building and architectural practice in 1970s and 1980s Pune (India)”, thematic dossier ‘Small-scale building enterprise and global home-ownership beyond the welfare state’, ABE Journal. Architecture beyond Europe, no. 20 (accepted for publication early November 2022).
– Melsens, Sarah, Bertels Inge, and Srivastava Amit, 2019. “The architectural production of India’s everyday modernism: Middle-class housing in Pune, 1960-1980.” ABE Journal. Architecture beyond Europe, no. 16. https://doi.org/10.4000/abe.7011.
– Melsens Sarah, Chetan Sahasrabudhe, “Technical writings as political: Building manuals and pattern books from British India (1880-1947)” in J. Campbell et al., Timber and construction , proceedings of the Ninth Annual Conference of the Construction History Society, Cambridge, 2022, p. 343-353.
– Melsens, S, Bertels, I & Srivastava A, 2019, “India’s architects Act, 1972. The triumph of identity work?” in J. Campbell, Proceedings of the Sixth Annual Conference of the Construction History Society, Cambridge, 2019.
– Melsens, S, Bertels, I & Mangaonkar-Vaiude, P 2017, “The emergence and impact of vocational training in the building trades in Pune (India): A case study of three Institutions”, in JWP Campbell (ed.), Building Histories: The Proceedings of the Fourth Conference of the Construction History Society. First edition, Cambridge, p. 27-39,
– Melsens, S, Mangaonkar-Vaiude, P & Joshi, Y 2016, “Architecte-entrepreneur in Post Independence Pune (India)”, in JWP Campbell et al. (ed.), Further studies in the History of Construction: The Proceedings of the Third Annual Conference of the Construction History Society. First Edition, Construction History Society, Cambridge, p. 461-472, – Melsens, S & Bertels, I 2015, “Shaping India’s cities: The changing role of Stakeholders in construction since Independence (1947)”, in B Bowen, D Friedman, T Leslie & J Ochsendorf (eds), Proceedings of the Fifth International Congress on Construction History, Chicago. vol. 2, Chicago, p. 574-582,